Légumes made in france

Que ce soit dans les travées du salon « Made in France » de Lyon ou dans les prises de position de certains candidats à la présidentielle, la question de la souveraineté alimentaire française gagne du terrain. La France n’est pas capable de produire certaines denrées sur son territoire comme le café ou le cacao. En revanche, a-t-elle le potentiel pour compenser une partie de ses importations, notamment pour les fruits et légumes?

Le salon du « Made in France » vient de s’achever à Lyon et le nombre croissant de visiteurs comme d’exposants illustre cette volonté d’une partie de la population française à revenir vers une production plus nationale. L’agriculture n’échappe pas à cette tendance. Depuis la crise de la Covid-19, la question de la « souveraineté alimentaire de la France » refait surface dans les débats. Dans son discours du 12 mars 2020, au tout début de l’épidémie, Emmanuel Macron insistait sur le fait que « déléguer notre alimentation » était « une folie ». A quelques mois de la présidentielle, plusieurs candidats prônent aussi cette relocalisation de notre agriculture.

Le « made in France » challengé par des importations en hausse

Parmi les produits les plus sujets à cette question de la relocalisation figurent les fruits et légumes. Après les produits d’épicerie, les fruits et légumes arrivent sur la deuxième marche du podium des produits alimentaires les plus importés en France en valeur (en M€).

Classement, en valeur, des denrées alimentaires les plus importées en France (en M€)

Classement, en valeur, des denrées alimentaires les plus importées en France (en M€) (Source : Agreste et douanes)

Ce constat se confirme dans le temps, puisque les volumes importés pour ces produits sont globalement en hausse depuis 2015. « Hormis des denrées telles que le café, le cacao, les bananes, qui seront toujours naturellement importées, a-t-on besoin de continuer à importer et pourquoi le faire ? », interrogeait Marion Guillou, membre du Haut Conseil pour le climat et ancienne PDG de l’Inra lors d’une table ronde le 2 mars 2021.

Evolution des importations de légumes - Made in France

(Source : Statistique et de la Prospective du ministère de l’agriculture (SSP))

Evolution des importations de fruits - Made in France

(Source : Statistique et de la Prospective du ministère de l’agriculture (SSP))

 

 

 

 

 

 

 

 

Les importations représentent 70% des fruits et 30 % des légumes consommés en France. Sur ces produits importés, Interfel estime qu’entre 30 et 40 % ne peuvent être produits sur le sol français car ce sont des produits exotiques : ananas, litchi, avocats, etc. Qu’impliquerait la relocalisation du reste des importations ?

Augmenter les surfaces …

Evolution des exportations de fruits et légumes

(Source : Statistique et de la Prospective du ministère de l’agriculture (SSP))

La France produit environ 2,4 Mt de fruits sur 143 000 ha. Elle en importe  3,5 Mt, dont environ 2,1 Mt de fruits tempérés (non exotiques). A rendement équivalent, la relocalisation de ces 2,1 Mt de fruits impliquerait la réimplantation de 125 000 ha de production fruitière sur le sol français.
Pour les légumes, la France en produit 5,6 Mt sur 248 000 ha. Elle importe environ 1,2 Mt de légumes cultivables sous nos latitude. La relocalisation de ces 1,2 Mt de légumes demanderait une surface supplémentaire en maraichage de 53 000 ha. C’est donc près de 180 000 ha supplémentaires qu’il faudrait dédier à la production de fruits et légumes pour réduire nos importations sur ces produits (hors produits exotiques). En imaginant que la surface dédiée à l’agriculture en France reste stable, cela impliquerait de réaffecter 2 % de la surface cultivée* à du maraichage. Cela modifie peu l’assolement français.

… et l’emploi agricole

Cette mutation de l’agriculture française aurait aussi des conséquences en matière d’emploi. Elle nécessiterait la création de 33 000 emplois en productions fruitières et de 5 300 emplois en maraichage. Si dans la tête des pouvoirs publics et des politiques, la première vocation de cette relocalisation est d’alimenter les citoyens français en fruits et légumes « Made in France », elle pourrait aussi dans un second temps contribuer à rééquilibrer le solde de la balance commerciale. En effet, depuis plusieurs années, les exportations de fruits et légumes français ne cessent de décroitre, particulièrement pour la filière fruitière.

 

*Cette surface exclut les sols boisés, surfaces toujours en herbe, landes, garrigues et maquis, sols artificialisés et sols dédiés à d’autres occupations. Les sols cultivés représentent 31% du territoire français.